Cridem

Lancer l'impression
02-05-2025

13:51

Israël bombarde les abords du palais présidentiel syrien, «une dangereuse escalade», selon Damas

RFI - Israël a mis sa menace à exécution contre la Syrie en bombardant, vendredi 2 mai, autour du palais présidentiel à Damas après que le chef de la minorité druze, protégée par le pouvoir israélien, a accusé le pouvoir du nouveau président syrien Ahmed al-Charaa de « génocide ». La présidence qualifie la frappe israélienne de « dangereuse escalade ».

La présidence syrienne a qualifié ce vendredi la frappe israélienne menée à l'aube près du palais présidentiel de Damas de « dangereuse escalade ». La présidence « condamne avec la plus grande fermeté la frappe qui a visé le palais présidentiel, menée par l'occupation israélienne », a déclaré le communiqué, ajoutant qu'elle « constitue une escalade dangereuse contre les institutions de l'État et sa souveraineté ».

Le plus influent chef religieux druze en Syrie, cheikh Hikmat al-Hajrin, avait dénoncé, jeudi 1er mai dans la soirée, une « campagne génocidaire injustifiée » visant des « civils » de sa communauté, après des affrontements confessionnels en début de semaine qui ont fait plus de 100 morts, selon une ONG.

Le chef religieux druze a alors réclamé « une intervention immédiate de forces internationales » et Israël – voisin de la Syrie avec laquelle il est en état de guerre et qui a pris fait et cause pour les Druzes – avait aussitôt menacé de répondre « avec force » si Damas ne protégeait pas cette minorité religieuse.

« Un message clair envoyé au régime syrien »

Quelques heures après, à l'aube ce vendredi, « des avions de combat ont frappé les environs du palais » présidentiel à Damas, a annoncé l'armée israélienne sur Telegram. « C'est un message clair envoyé au régime syrien. Nous ne permettrons pas que des forces (syriennes) soient dépêchées au sud de Damas ou menacent de quelque manière que ce soit la communauté druze », ont martelé dans un communiqué, publié en anglais par le journal Times of Israel, le Premier ministre Benyamin Netanyahu et son ministre de la Défense Israël Katz.

C’est une pratique régulièrement utilisée par l’armée israélienne : une frappe aérienne visant un lieu très proche de la cible qui est réellement menacée. Mais ce qui est inhabituel dans cette attaque israélienne, c'est précisément l’objectif réel, le palais présidentiel à Damas. Cette action de l’aviation israélienne intervient alors que jeudi soir, des centaines de membres de la communauté druze israélienne ont manifesté, précise notre correspondant à Jérusalem, Michel Paul. Ils ont bloqué des carrefours dans le nord du pays et se sont aussi rassemblés face à la résidence de Benyamin Netanyahu dans la ville de Césarée, pour exiger qu’il tienne ses promesses d’aide à l’égard de la communauté. Des réservistes druzes ont adressé une lettre ouverte aux dirigeants israéliens : « Des centaines de combattants druzes sont prêts à se porter volontaires immédiatement pour combattre aux côtés de nos frères en Syrie », affirment-ils.

Instabilité persistante en Syrie

Des heurts à proximité et au sud de Damas entre combattants druzes et groupes armés liés au pouvoir sunnite du président Ahmed al-Charaa illustrent l'instabilité persistante en Syrie, près de cinq mois après le renversement de son prédécesseur Bachar el-Assad, issu de la minorité alaouite. « Nous ne faisons plus confiance à une entité qui prétend être un gouvernement. [...] Un gouvernement ne tue pas son peuple en recourant à ses propres milices extrémistes, puis, après les massacres, en prétendant que ce sont des éléments incontrôlés », avait dénoncé le cheikh druze.

L'ONU a exhorté « toutes les parties à faire preuve d'un maximum de retenue » et la diplomatie américaine a fustigé « les dernières violences et la rhétorique incendiaire » anti-druzes « répréhensibles et inacceptables ». Les Druzes sont une minorité de l'islam chiite. Ses membres sont répartis entre le Liban, la Syrie et Israël.

En Syrie, les Druzes cloîtrés chez eux

Selon l'OSDH, au moins 73 personnes sont mortes en Syrie dans des affrontements inter-confessionnels entre des groupes armés liés au nouveau pouvoir syrien et la minorité druze. Les Druzes, surtout présents au sud de la Syrie, vivent depuis trois jours dans la peur d'être pris pour cible.

« J'ai peur. Et sortir de chez moi n'est pas une option, car les routes sont pleines d'hommes armés, des djihadistes qui nous tuent car nous sommes Druzes. Ils nous tirent dessus et ils brûlent nos maisons. » Cette femme druze, habitante de Soueida, au sud de Damas, souhaite rester anonyme par crainte des représailles. Depuis plus de deux jours, elle est cloîtrée chez elle et n'ose pas mettre un pied dehors. « Hier, dix jeunes hommes sont morts et plusieurs ont été capturés. Aucun druze n'ose sortir : il n'y a aucune circulation, le marché est fermé, les commerces aussi, personne n'est allé travailler. »

Pourtant, les autorités syriennes l'assurent : elles protègent « toutes les composantes de la société ». Mais malgré le déploiement des forces de sécurité officielles, la communauté druze se sent toujours en danger.

« Les forces de sécurité gouvernementales ne nous protègent pas vraiment. Je ne dirais pas qu'elles aident les factions de djihadistes, mais en tout cas, elles ne font pas grand chose pour les arrêter, ajoute-t-elle. Le gouvernement a beau répéter qu'il veut "la paix et une Syrie unie", mais ce ne sont que de belles paroles, car les actions de ce gouvernement sont en contradiction avec ce qu'il dit ! Il dit qu'il veut mettre fin aux violences, mais je ne pense pas que ce soit sa vraie intention. »

Concernant l'intervention d'Israël qui prend fait et cause pour la communauté druze syrienne, cette femme y voit une manœuvre politique pour déstabiliser le pouvoir de Damas, que l'État hébreu considère comme une menace islamiste.

Par : RFI avec AFP





Les articles, commentaires et propos sont la propriété de leur(s) auteur(s) et n'engagent que leur avis, opinion et responsabilité


 


Toute reprise d'article ou extrait d'article devra inclure une référence www.cridem.org