Cridem

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25-10-2012

15:19

Tribu dans tous ses états et démocratie (3).

Interactions des pouvoirs.. 

Abordons maintenant les influences du » pouvoir politique » sur le « facteur tribal » et vice versa.Pour une plus aisée lecture de l’exposé divisons ces interactions en trois fiches :

a) Les interactions positives.
b) Les interactions négatives.
c) Les interactions objectives ou neutres.

Interactions Positives :

- Le pouvoir politique peut orienter le facteur tribal vers un renforcement de l’Etat et de la cohésion nationale.

- Le pouvoir politique est à même d’assurer la transformation des solidarités étroites (liées au seul generis) en solidarités plus vastes (celle du generis et du solum).

- Le facteur tribal peut renforcer le pouvoir politique en devenant centripète si le réseau de ses solidarités aboutit au renforcement des pouvoirs de l’Etat.

- Les contradictions entre acteurs tribaux rivaux permettent, souvent, au pouvoir centralisateur de se poser en arbitre et de réguler les tendances centrifuges. Etc.

Interactions Négatives :

- Le pouvoir politique et les divers acteurs partisans exacerbent souvent, à des fins démagogiques, la fibre tribale en favorisant la persistance ou l’accentuation des antagonismes latents à l’intérieur des tribus ou entre elles au point de mettre en danger la paix civil et la cohésion du tissus social et la l’unité nationale.

- Le pouvoir politique use le plus souvent de prébendes, de passe-droits, du laxisme, etc. pour domestiquer le facteur tribal et le dévier de toute concurrence politique loyale.

- Le facteur tribal, pour maintenir ses privilèges ou pour les augmenter parie et concourt toujours à la déliquescence de l’Etat.

A cet égard, et pour préserver leur puissance de nuisance, les Emirs, chefs de cantons, chefs de sectes religieux et autres notabilités spirituelles et/ou temporelles prennent à leur compte cette première partie de la réflexion de Paul Valery : « …Si l’Etat est fort il nous écrase… » Et ils contribuent à précipiter la concrétisation, par ignorance ou masochisme, de la suite de la citation : « … s’il est faible, nous périssons…» Le facteur tribal, égoïste par essence, n’en a cure. D’autant qu’il n’est pas à une contradiction près !

- Le facteur tribal use et abuse du chantage à l’égard du pouvoir politique par un marchandage sordide permanent et le jeu des enchères et des surenchères entre les acteurs politiques rivaux. ; imitant ainsi les autres groupes de pression.

Interactions objectives :

- Le pouvoir politique est oblige, en permanence, de tenir compte du facteur tribal pour ses équilibres régionaux et locaux.

- La manipulation du facteur tribal est une donnée permanente du jeu du pouvoir politique et de ses concurrents et rivaux. Efficace en apparence cette manipulation est toujours une arme à double tranchant pour tous les acteurs de la scène politique.

- Le pouvoir politique, vis-à-vis du facteur tribal, est confronté à un équilibre précaire entre choix opposés :

a- Comment asseoir une majorité électorale et avec qui ?

b- Faut-il être regardant quant à la distribution des prébendes et autres passe-droits aux partisans et leurs conséquences : les privilèges exorbitants et injustes et le déni de droits légitimes à d’autres ?

c- Quelle attitude observer à l’égard d’ »amis politiques » dont le renforcement accentue, à terme, Les tendances centrifuges et les rébellions d’autres ?

e- Le pouvoir étatique, c’est-à-dire le pouvoir politique installé ne saurait se constituer comme « oligopole » du marché des idées et orientations qu’en développant ses propres institutions indépendantes : lobbies familiaux, administrations territoriales, juridictions, force publique, administrations de perceptions d’impôts et taxes etc.

Or le facteur tribal que l’on veut domestiquer ou rapprocher n’est opérant que si ces diverses institutions sont fragiles ou fragilisées ! Ces quelques exemples,, que je souhaiterai significatifs montrent les limites du « pouvoir politique » Quand il est confronté au » facteur tribal » ; celui-ci véhiculant son héritage nomade qui, même altéré, ou » corrompu » dans le sens positif du terme par l’urbanisation reste l’ennemi juré du pouvoir politique.

Et la tribu reste un élément perturbateur du fonctionnement normal de l’Etat jacobin, lui la concrétisation du pouvoir politique en Mauritanie, au Sénégal et dans toutes les contrées au parcours historique similaire ou rapprochée. Faut-il, pour autant, inonder l’univers des larmes parce que le pouvoir, la culture ou le facteur tribal arrête ou limite les extravagances du pouvoir politique et ses manifestations sur le terrain : les institutions administrative, judiciaire, économique etc. ?

Peut-être est ce là un équilibre naturel » made in Mauritania » et qui applique sur le terrain la formule de Montesqieu : «…pour qu’on ne puisse abuse du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir… » Rien ne sert alors d’emprunter à un certain Don Quichotte de la Manche son style ou de paraphraser l’ancien chef d’Etat somalien Mohamed Siad Barre qui, en avril 1971, clamait avec grandiloquence :

« Nous chasserons le tribalisme et marcherons tout droit vers nos buts, vers le socialisme… » nous savons, malheureusement, ce qui est advenu de nos frères somaliens e t de leur magnifique pays qui se distinguait par une remarquable homogénéité ethnique, religieuse et linguistique : l’exacerbation du fait familial,, tribal, clanique , régional etc., la multiplication des « seigneurs de guerre « , les viols, vols destructions et croisement d’influences étrangères, un vrai « Bilad Es-Siba'

Mohamed Said Hamody


 


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