29-04-2013 08:17 - Interview avec Yacoub Diakhaté, Manager de Cee Pee : 'La pauvreté est la mère de tous les vices, le chômage et l’oisiveté aussi'

Interview avec Yacoub Diakhaté, Manager de Cee Pee :  'La pauvreté est la mère de tous les vices, le chômage et l’oisiveté aussi'

L’Authentique : après la sortie de l’album, quels sont vos projets ?

Yacoub Diakhaté
: on remercie Dieu. La sortie de l’album a fait un buzz. C’était un énorme succès. Toutefois, je dois reconnaître que les « dégâts collatéraux » ont été nombreux : en Mauritanie quand un artiste sort un album pour régler ses problèmes il ne sait pas qu’il s’attire l’attention des autres. C’est tout le monde qui le sollicite chacun pensant qu’il a décroché le Jackpot.

Alors qu’il n’en est rien. Depuis notre dernier succès, nous éprouvons des difficultés pour produire le moindre clip. Nous avons certes fait l’actualité partout en Mauritanie et même dans la sous région, mais nous ne disposons pas de moyens de nos ambitions.

Cee Pee ne quémande pas, il n’a jamais reçu d’aide du ministère de la Culture qui est pourtant sensé le soutenir. Cee Pee travaille avec Oxfam dans un projet de la sécurité alimentaire au même titre que Baaba Mal, 2Face, Daara-J. il est le seul artiste mauritanien choisi dans une compilation regroupant plusieurs artistes jamaïcains.

L’Authentique : est-ce à dire que le ministère de la Culture n’est pas totalement engagé dans la promotion de la culture en Mauritanie ?

Yacoub Diakhaté : bien sûr… Savez-vous qu’avec le 1% des recettes douanières qu’on attribue chaque année au Ministère de la Culture , de la jeunesse et de sport, les artistes mauritaniens n’ont même pas un lieu pour se produire. La Maison des jeunes que j’appelle’’ « Maison des vieux »’ est louée à 150 000 UM pour chaque cérémonie. Dans sa lutte contre la délinquance juvénile, l’Etat pouvait impliquer les artistes en tant que messagers, porteurs de voix mais il les ignore voire les considère comme des délinquants.

Nous ne sommes pas des délinquants d’ailleurs la preuve c’est que parmi les artistes mauritaniens il ya des enseignants, des ingénieurs qui sont passionnés de la musique à travers laquelle ils canalisent leurs énergies. Toutefois, je reconnais qu’au même titre que la vie artistique, la santé ne marche pas l’éducation ne marche plus. La Mauritanie al hamdoulilahi ça va.

Elle va bien car elle a plein de ressources mais c’est le Mauritanien qui ne va pas bien. Il est temps que l’Etat vienne au secours des artistes. Le Mauritanien est un génie le plus souvent mais son environnement n’est pas propice à son épanouissement

L’Authentique : comment expliquez-vous la présence de Biram Dah Ould Abeid, président de IRA, à votre concert ?

Yacoub Diakhaté : effectivement cette personnalité était présente à notre concert du 11 avril à l’ancienne maison des jeunes. Certainement parce que nous nous retrouvons dans le même combat, celui de l’égalité entre tous les citoyens, de la justice dans le pays et de la nécessité du respect du droit.

L’Authentique : en tant que messager comment voyez-vous la recrudescence de la criminalité ?

Yacoub Diakhaté : personnellement je suis contre la délinquance, le viol et toutes autres formes de violences. D’ailleurs personne ne veut voir un membre de sa famille agressé, ou le cas échéant, un proche menotté et trainé devant le tribunal. La recrudescence de la criminalité est uniquement la faute de l’Etat qui cantonne les jeunes chez eux et refuse d’ouvrir des espaces par exemple des centres de formation, de loisirs, de divertissement où les jeunes peuvent extérioriser ce qu’ils ont dans le cœur.

Faute de ça, leurs désirs de divertissements, de loisirs se transforment en violences. Combien y a –t-il eu de talents de footballeurs que l’Etat fait disparaître ?. Combien de Messie ou d’Ibrahimovish ont péri dans l’œuf ? Les jeunes sont pris en otage dans leur propre pays. Conséquemment, ils se sont tournés vers la violence pour extérioriser leurs frustrations.

Ce qui est très dangereux dans ce pays majoritairement jeune. Même les écoles sont devenues maintenant des lieux de violences. L’Etat doit revoir ses politiques envers les jeunes mauritaniens. ; la pauvreté est la mère de tous les vices, le chômage et l’oisiveté aussi.

L’Authentique : les rafles nocturnes, sont-elles utiles pour assurer la sécurité dans la ville de Nouakchott ?

Yacoub Diakhaté : je ne vois pas l’utilité des rafles. Si vous faites les statistiques vous verrez que depuis que les rafles ont commencé la criminalité a augmenté.

L’Authentique : pourquoi ne vous produisez-vous jamais à l’IFM ?

Yacoub Diakhaté : C’est une honte pour notre Etat et plus particulièrement notre ministère de tutelle de laisser une institution étrangère comme l’Institut Français de Mauritanie imposer ses lois aux artistes mauritaniens. Ceci est d’autant plus grave que tout ne se passe pas dans les règles de l’art au sein de cette institution ou le sieur Monza fait la pluie et le beau temps/ D’ailleurs j’appelle l’IFM l’Institut Français de Monza parce que c’est lui qui y décide et y fait la loi. Savez-vous que même pour bénéficier du sponsoring de l’IFM, il faut nécessairement passer par Monza ? J’appelle cela du clientélisme à l’état pure et brute ! Cela ne doit pas durer/

Propos recueillis par Cheikh Oumar N’Diaye


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