14-12-2012 23:07 - Clin d’œil : Réécrire notre histoire

Clin d’œil : Réécrire notre histoire

Certainement, en ces journées de fête d’indépendance, nous devons nous rappeler de nos disparus. Et c’est vrai, nous ne nous en sommes pas privés ces derniers jours. Les télévisions, les radios, les journaux se sont attelés largement sur notre passé et sur ceux qui l’avaient construit.

Mais j’ai été ahuri par la propension de nos medias à oublier les hommes qui avaient réellement rêvé d’indépendance. Toute la lumière a été jetée sur ce 28 Novembre 1960, où nous accédâmes à une indépendance qui resta, pendant 10 années au moins,, purement factice.

On a largement passé la photo du feu Mokhtar Ould Daddah prononçant, sous un immense hangar, dans un Nouakchott balbutiant, le discours d’indépendance. Cet homme qui a construit la Mauritanie d’aujourd’hui n’a pourtant jamais, tout au long de sa carrière de fonctionnaire puis d’étudiant été un indépendantiste fervent.

Ceux qui dés le début des années 50 avaient réclamé l’indépendance avaient vite été écartés par le colonisateur puis avaient été effacés de l’histoire officielle Ahmedou Ould Horma, Mohamed Fall Ould Oumeir, Dey Ould Sidi Baba, Bouyagui Ould Abidine par exemple sont les grands oubliés de cette fête du souvenir.

Certes, ils avaient pour la plupart opté, à l’époque pour un rattachement au Maroc, mais c’était dans une autre optique, celle de la division du continent entre deux axes, l’un soutenu par les anciens colonisateurs, celui de Monrovia et l’autre celui de Casablanca justement qui prônait la libération des peuples du joug colonial.

Les indépendantistes mauritaniens avaient aussi peur de voir apparaitre un Etat trop fragile, incapable de sortir du giron de l’ancien colonisateur. En plus, comme la majorité des intellectuels arabes et africains de l’époque, fortement influencés par les discours de Nasser ou N’Nkrumah, ils étaient « unionistes ». Tout cela n’enlève rien à leur passé de résistants au colonialisme et, quoiqu’on dise, de véritables précurseurs de l’’indépendance.

Un autre oubli, plus étonnant celui là, si l’on se place du point de vue de l’histoire « officielle », est celui de Sid’El Mokhtar Ould Yahya Ndiaye, « Sidel » comme l’appelait affectueusement le président Ould Daddah .

Aucun mot sur cet ancien représentant de la Mauritanie à l’Assemblée Nationale française , très proche des anciens colonisateurs qui avait parrainé Mokhtar Ould Daddah, qui avait fortement œuvré pour qu’il soit élu dans la circonscription si improbable de Chinguitti , sans véritable campagne comme l’écrit ce dernier dans sa biographie. Sid’El Mokhtar Ould Yahiya Ndiaye, métis mauritano-sénégalais, avait aussi été le premier Président de l’Assemblée Nationale mauritanienne .Sur le plan humain, il avait également, au dire de ceux qui l’avaient connu, des qualités humaines indéniables.

Nous avons, comme qui dirait, une propension à écrire l’histoire à la soviétique, en rayant les images du passé qui ne plaisent pas. C’est ainsi d’ailleurs que beaucoup de nos lettrés sont en train de réécrire notre passé colonial. Grace à eux, que Dieu les bénisse, tout le monde pourra s’octroyer le titre si envié dans certains milieux, de « descendant de résistants ».Qui a dit que nous ne sommes pas un peuple heureux?

Beyrouk


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Commentaires (5)

  • sidaty1 (H) 15/12/2012 13:46 X

    J ai assisté un débat sur la résistance contre les colons à travers les textes littéraires, j'en suis sorti avec l'impression que tout le monde a combattu le colonisateur qui n'a bénéficié d'aucune faveur locale. Or la pénétration pacifique décidée par les colons a été bien saluée par certaines parties de la Mauritanie. Les textes qui sont des témoignages de cet époque si précieux nous présentent une histoire qui ne voudrait que l'on parle des choses qui plaisent et voila toute la problématique de l'histoire Mauritanienne.

  • Le Pacificateur (H) 15/12/2012 01:52 X

    Hé, Beyrouk, on ne s'improvise pas historien ! La vraie histoire de la Mauritanie n'est pas encore écrite ! Ce que l'on enseigne dans les écoles du pays est un préfabriqué ! Et on connaît les raisons à ça ! Donc ne polluez pas nos yeux avec ces sautes d'humeurs !

    Tant que les nationalistes qui gravitent autour de l'Etat ne lâchent pas prise, eh bien le bourrage des cranes des pauvres écoliers mauritaniens va continuer de plus belle !!!

  • pablodia (H) 15/12/2012 00:38 X

    Très bonne réflexion.
    Une génération qui ignore son histoire n’a pas de passé, ni de futur.
    En Mauritanie,l'histoire ne retient que les démolisseurs du pays. Où est passé le premier livre consacré à l'histoire de la Mauritanie et qui était enseigné dans les écoles?

  • cheikh tourad (H) 15/12/2012 00:36 X

    Je constate qu'il n'y a aucun commentaire sur cet article qui dit vrai pourtant. Quand on entend nos radios et nos Tvs nous pensions que nous sommes l’Algérie: les français ont quitté la RIM sous les balles de la résistance. Alors que les mauritaniens ont voté en 58 contre l'indépendance seule la guinée de Sékou touré avait voté pour l’indépendance. Tous les chefs tribaux et les chefs de guerre avait finalement pacté avec les français -sauf ceux qui sont morts en martyr ou été en exile.

    Un autre trou de l’histoire entre la fin de la résistance (je dirai plutôt jihad) 1934 et l’indépendance 1960 si elle est vraiment une indépendance. Une indépendance donnée et un pays confié à un allié dont la femme est française…. et l'on oublie aussi que c'est la france qui a unifié le pays qui était une "blade saiba" où la raison du plus fort était la meilleure. On oublie aussi la fatoua du grand savant ould cheikh sidya qui visait l'instauration de la paix dans cette région qui n'était pas un état ne l'oublions.

  • larou larou (H) 15/12/2012 00:06 X

    Mr Beyrouk vous avez vu juste. C'est dans cet ordre d'idées qu'il faut placer le discours de Baba Miské lors de la table ronde télévisée de l'autre soir, tout comme l'article intitulé Nous fêtons le 52 anniversaire de l'indépendance nationale paru récemment sur CRIDEM.